En se rendant à un rendez-vous, Oscar Wilde, alors en pleine célébrité, tombe sur le cadavre nu d'un adolescent couvert de sang et entouré de chandelles. Sous le choc l'auteur s'enfuit et lorsqu'il revient le lendemain, il ne trouve plus trace du crime. Il se confie alors à deux de ses amis, le poète Robert Shepard et un médecin-écrivain, depuis peu créateur d'un détective fascinant, Arthur Conan Doyle. Avec leur assistante, plus ou moins enthousiaste, il décide d'enquêter, tant pour rendre justice au jeune homme - qu'il connaissait - que pour tester les passionantes techniques d'observation du tout récent Sherlock Holmes.
Que voici un postulat de départ intéressant ! Dans le Londres victorien de la fin du XIXe siècle, Oscar Wilde promène sa formidable personnalité, se livrant aux délices de l'observation, dérangeant à loisir ceux qui aimeraient passer discrètement sur un scandale possible, semant aphorismes et bons mots avec une largeur d'esprit peu commune et un hédonisme revendiqué. On sent que l'auteur a pris grand plaisir à faire revivre le Londres de cette époque et à redonner substance aux personnages célèbres de l'époque. Jusqu'à Dickens, pourtant mort depuis près de vingt ans, qui vous guette à chaque pas. Mais pour moi, le grand moment fut sans aucun doute celui où Arthur Conan Doyle observant le brio (et l'enthousiasme un peu potache) avec lequel Wilde applique les techniques de son tout nouveau détective à sa façon un peu nonchalante voire contemplative, décide de s'en inspirer pour créer un nouveau personnage : Mycroft comme avatar de d'Oscar, quel ravissement ! Alors l'enquête est peut être assez quelquonque quoique rondement menée mais l'atmosphère, le style, le cadre et les personnages compensent largement et en font une lecture décidément agréable et hautement victorienne. Réjouissant !
Oscar Wilde et le meurtre au Champagne - Gyles Brandreth - 2007
PS : Ce roman est le premier d'une série, voilà qui me plaît...
PPS : Quel homme cet Oscar ! Impulsif, enthousiaste, changeant, près à tout laisser tomber pris d'une terrible envie d'huitres et une fois au restaurant commandant plutôt des crevettes car "la constance n'est que l'ultime refuge de ceux qui manque d'imagination" (je cite de mémoire, vous me connaissez).