Dans un village dont on ne saura pas le nom, la vie quotidienne s'étiole et s'enlise. Les seules animations sont le fait de la chasse, toujours populaire, et des "visiteurs de la ville" qui achètent des résidences secondaires et amènent vie et argent, mais ne seront jamais vraiment d'ici. Dans ce contexte un peu sombre, un peu triste, des hommes et des femmes se croisent, rêvent, se manquent, s'ignorent, s'inventent des histoires qu'ils pensent partagées mais sont souvent bien loin de l'être...
En général je n'aime guère les nouvelles mais quand Karine me conseille un livre, j'ai tendance à l'écouter ; il parait en effet que nous avons quelques goûts communs (du moins l'ai-je entendu dire). Et une fois encore j'ai eu bien raison de lui faire confiance car cette lecture fut un pur plaisir !
Quant à savoir si ce sont réellement des nouvelles, la question se pose. Ces histoires sont certes distinctes mais ensemble elles brossent, par leur unité de lieu et de ton, le portrait en creux et en sombre d'un village dans le Québec d'aujourd'hui. Un village un peu reculé, un peu loin, un peu déserté, devenu le petit coin de paradis de quelques citadins qui pensent y trouver nature et authenticité mais dont le rêve n'est que cela... un rêve. Car si désormais ce sont ces visiteurs qui assurent la survie du village, les "vrais" habitants ne l'acceptent guère, creusant l'incompréhension par une indifférence calculée, une ignorance cultivée, une méfiance affichée. Dans un langage tout simple en apparence et aussi lumineux que la nature alentour, l'auteure nous invite dans un univers clos, étouffant, tissé de non-dits et de frustrations, propre à générer les réactions les plus exacerbées. Prenant et même un tout petit peu effrayant !
La héronnière - Lise Tremblay - 2005 - Léméac - Acte Sud
Encore une bonne pioche pour le projet Mon québec en septembre lancé par ma Karine préférée