A Montréal, dans le quartier ouvrier de Saint-Henri, la famile Lacasse se débat entre problèmes d'argent et aspirations au bonheur. La jeune Florentine cherche l'amour, son père une certaine dignité, sa mère un toit sûr pour sa famille mais tout est infiniment compliqué pour eux en cette période de crise. En cette année 1940, pourtant, la guerre qui gronde loin à l'est va peut-être paradoxalement être porteuse d'un certain espoir...
Bonheur d'occasion est un des classiques incontournables de la littérature québécoise - et cela bien qu'il ait été écrit par une manitobaine - c'est en effet le premier roman québécois urbain traitant de la vie des francophones pauvres de la métropole montréalaise. Ce roman a marqué son temps et influencé nombre d'auteurs au premier rang desquels Michel Tremblay qui trente ans plus tard devait faire revivre cette époque et donner une voix à ce petit peuple dans La grosse femme d'à côté est enceinte. Et certes je peux comprendre le choc littéraire de Tremblay lorsqu'il s'est plongé dans ce roman - fresque sociale ambitieuse qui peignait au couleur du réalisme le milieu même d'où il était issu - il décrit d'ailleurs excellement cette découverte dans Un ange cornu avec des ailes de tôle, livre que je ne saurais trop vous recommander.
Pour autant Bonheur d'occasion ne fut pas pour moi le coup de coeur attendu. Certes il est fort bien écrit et excellement construit - j'aurais plaisir à lire d'autres livres de l'auteure - mais dans cette chronique familiale uniformément grise, il manque un ingrédient essentiel à mes yeux, quelque chose comme de la tendresse pour les personnages. En héritière douée du naturalisme littéraire, Gabrielle Roy pour son premier roman a réuni une série d'archétypes et de malheurs - presque tout y est je crois - et le propos pêche un tantinet par son côté démonstratif à mes yeux. Et puis bon quoi, la pauvreté ne suffit donc pas pour que tous ces personnages se refusent obstinément le moindre sentiment, et si ce n'était que l'amour... non pas d'amitié, pas de confiance, pas de solidarité - même entre voisine - sans doute ce qui m'a le plus surprise et m'a poussée à me demander - mais est-ce ma conscience de classe qui chouine - si cette auteure des hauts quartiers n'avait pas, pour la bonne cause, forcé un peu le trait en peignant les pauvres d'en bas. Une belle oeuvre donc et qui a marqué son temps mais a laissé mon petit coeur sur sa faim. Classique !
Bonheur d'occasion - Gabrielle Roy - 1945
Les avis beaucoup plus enthousiastes de Karine, Denis et Isallysun
Lu dans le cadre de la Lecture commune autour de Gabrielle Roy de Québec en septembre