16 septembre 2013
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Après avoir lu Un ange cornu avec des ailes de tôle, je savais que j'allais continuer avec Tremblay, obligée ! J'ai donc filé vers La Traversée du continent, son dernier roman, une pure merveille dont je vous parlerai bientôt et puis j'ai décidé de remonter aux sources en lisant ces fameuses Chroniques du plateau Mont-royal, oeuvre dont j'entends parler depuis fort longtemps.
La grosse femme d'à côté est enceinte, premier opus de ces chroniques, est également un des premiers romans qui a réellement mis à l'honneur le joual, la langue parlée québécoise ou, dans ce cas précis, le parlé populaire de l'est de Montréal. Trente ans après sa sortie, ce roman a gardé toute sa fraîcheur et sa magie.
Autour de la grosse femme, seul personnage sans nom, figure de mère universelle immobilisée par sa grossesse et son obésité, gravite tout un microcosme, la famille proche qui vit sous le même toit, les voisins qui partagent la même rue, le quartier enfin tout autour. Sous son regard un peu tutélaire, un peu distant par la force des choses mais éminement compréhensif, se jouent les mille petits drames, les mille petits bonheurs du quotidien. Sans complaisance mais avec une sorte de gaité foncière, Tremblay trace le portrait d'une famille ouvrière plutôt pauvre, à la fois unie et déchirée, protectrice et angoissante, cruelle et joyeuse. Ce qui frappe le plus bien sûr dans cette oeuvre c'est l'importance que l'auteur accorde à la langue. Langue parlée bien sûr, ce joual qui est la langue de son enfance, mais aussi langue chantante, fluide, imagée qui procure un réel plaisir de lecture. Plus encore, langue comme personnage principal au coeur de cette histoire où sept femmes sont enceintes en même temps mais où une seule semble pouvoir le vivre dans le bonheur. Car si la grosse femme est heureuse d'attendre ce nouvel enfant malgré son âge réputé trop avancé ou sa famille qui cache mal sa honte, les voisines enceintes, elles, ignorent plus ou moins complètement autant ce qui se passe en elle que ce qu'il va leur arriver et n'ont personne vers qui se tourner. Sur ses sujets en effet les langues sont scellées, par la pudeur, la décence, la honte, la religion, l'ignorance... C'est au cours d'une veillée, moment parlé s'il en fut, que la grosse femme finira par rassembler autour d'elle ses jeunes mères perdues et sous couvert de les faire profiter de son expérience leur rendra la parole. Et c'est bien ce que fait Tremblay lui aussi, rendre vie et parole aux acteurs de son enfance. Superbe !
La grosse femme d'à côté est enceinte - Michel Tramblay - 1978 - Acte sud
Allez pour faire bonne figure dans la LC Tremblay de québéc en septembre, je réédite un billet du 7 octobre 2008 (grand tolkien tout ce temps déjà) histoire de faire un peu partager ma passion pour Tremblay...
Published by yueyin
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dans
roman québécois