
Bien cela étant dit qu'est ce que je vais bien pouvoir vous raconter à son sujet. C'est un auteur compositeur interprète bien qu'il ait pas mal travaillé avec d'autres compositeurs. Il doit frôler la soixantaine, chante depuis la fin des sixties, a publié 14 albums en studio (on dit publier ?), on l'entend peu sur les médias mais ses concerts sont archipleins ! Voilà pour les généralités.
La première chose qui m'a frappé en l'écoutant, c'est sa voix je pense... Une voix grave et trainante à la diction précise et sonore qui fait claquer les mots les plus étranges, les plus inattendus.
Ses textes, ensuite. C'est un auteur sombre, son univers est torturé, pessimiste, partant des obsessions de sa génération au début de sa carrière pour s'enfoncer dans un no futur limite punk, avec des accès d'humour plutôt grinçant. Le tout dans une langue étonnament riche, mariant les mots les plus incongrus, truffée de références cinématographiques, littéraires ou musicale. ( L'affaire Rimbaud ...) J'ai d'ailleurs essayé d'imposer un de ses textes sur ma liste de français au Bac mais j'ai essuyé un refus sans appel ! pfff ! C'était exil sur planète fantôme, c'est vous dire s'ils ont eu tort.

Je l'ai vu en concert et là j'ai définitivement craqué. Je ne connaissais pas le quart de la moitié des chansons mais j'avais l'impression de recevoir sa voix et sa musique en perfusion. C'est un concert où je n'ai pratiquement pas bougé, complètement à l'ouest. J'ai vu pas mal de concerts de lui depuis et c'est récurrent. A part les moments mystico-nostalgique où tout le monde chante, je ne bouge pas, je suis quelquepart dans l'astral

Je ne vais pas vous citer les 14 albums, de toute façon, je ne saurais pas qualifier les changements perceptibles dans le son de ses albums, mais l'inspiration reste noire, décalée, dérangeante, parfois drôle, quasi cyberpunk et la musique suit, noire elle aussi, toujours à base rock, sa voix aussi obsédante.

Une obsession qui se passe de bouche de maniaque à oreille de disciple. A Montréal une année, il y avait un concert gratuit dans une école excentrée (un truc incroyable). Cela faisait déjà un bout de temps que je bassinais tout le monde avec mon éternel HFT que personne ne connaissait. Alors certes l'assistance était réduite, 200 personnes peut être, mais j'ai pu vérifier que j'avais fait du bon boulot question relation publique... je connaissais les trois-quart de la salle.
Plus tard, en emménageant avec mon Amour, j'ai découvert que nous aurions désormais tous les vinyles du trublion en double (et même triple suite à des récupérations sauvages), depuis on s'est racheté presque tous les CD, parce qu'en vinyle quand même ! Mais cela nous est arrivé de les ressortir pour faire écouter des chansons particulièrement schpricht aux enfant (la cancoillote !).

Et pour clore ce désastre, je crois que c'est Ferré qui parle le mieux de HFT alors cédons la place :
Il vint alors, Hubert-Félix, débordant de tendresse, parlant, chantant et donnant au verbe une pathétique présence : c'était un oiseau vainqueur, les cigales sous les ailes, la musique se révélant soudain comme l'inédit de la folie, quand la folie devient maîtresse et que plus rien ne l'arrête.
Léo Ferré